Andelaroche le 18 Juin 1940
Mon cher petit mari Je t'écris ne sachant si tu recevras ma lettre car de toi je n'ai aucune nouvelle, à part ton télégramme annonçant ton arrivée et la carte de Malherbes. Ici nous sommes dans une drôle de situation. Après avoir vu le défilé des réfugiés en auto, de l'armée en débandade; ce matin ce sont les cyclistes et ceux qui vont à pied tel que : soldats isolés et sans arme. Quand on en voit passer dans des camions en ordre on est un peu réconforté. Je t'avais écrit hier qu'Yves , Marc et Serge étaient partis pour Limoges, mais en route ayant entendu qu'il y avait des pourparlers, ils ont fait demi-tour et ont rencontré le jeune homme qui les cherchait pour Roanne. Yves n'a pas voulu y aller disant que tout était changé ; mais ce matin entendant dire que les hostilités continuent tant que c'est en pourparlers je les ai fait déguerpir. J'ai trop peur de voir déboucher d'un moment à l'autre une colonne. Voilà donc notre situation Yves doit être arrivé à Roanne s'il n'a pas en d'avaro et nous qui attendons car j'avais hier eu idée de partir à pied jusqu'à Lapalisse, mais avec tous les petits et puis on dit tellement en TSF qu'il ne faut pas rester sur les routes qu'il y a moins de danger dans les maisons, que nous restons là. Il et 3 h 10 Blandine revient de Droiturier avec Odette pour avoir du pain car le boulanger n'a pas pu venir hier, où nous n'avions plus de pain, les routes étant trop encombrées, pense donc que les autres étaient obligés de stationner devant chez nous. Aujourd'hui c'est surtout des militaires en camion qui passent en plus des jeunes gens en vélo. Mais pour l'instant c'est le calme complet si bien que je vais redouter d'en entendre d'autres qui ne seraient plus des Français car d'après les dire ils sont à 40 km. N'ayant pas idée que tu recevras ma lettre je m'arrête et t'embrasse quand même.
Claire |